Grande démission, fuite des talents, pénurie de main d’œuvre…où en est-on exactement ?
Par Morgane DUVAL
Selon la Dares[1], fin 2021 et début 2022, le nombre de démissions a atteint un niveau historiquement haut, avec près de 520 000 démissions par trimestre, dont 470 000 démissions de CDI. Certes, ce chiffre n’est pas inédit, il est néanmoins très élevé et traduit sans aucun doute une lame de fond que les employeurs ne sauraient ignorer. De plus, les retours à l’emploi des démissionnaires semblent rapides : environ 8 démissionnaires de CDI sur 10 au second semestre 2021 sont en emploi dans les 6 mois qui suivent. Autrefois analysées comme un signe d’instabilité, les expériences relativement courtes sont aujourd’hui perçues comme le témoignage d’une curiosité, d’une adaptabilité et d’une volonté de monter en compétences. En d’autres termes, les salariés n’ont plus peur de quitter leur emploi, y compris en CDI.
Or, l’on sait qu’un turn-over massif engendre des coûts importants pour une entreprise[2] et au-delà, certains secteurs peinent à recruter. De quels leviers disposent les employeurs pour attirer et fidéliser de futurs collaborateurs ? En d’autres termes, qu’est-ce qui fait fuir les salariés ?
La crise Covid a sans nulle doute mis en exergue des aspirations latentes qui doivent amener les entreprises à repenser, moderniser, leur stratégie ressources humaines :
- Être attentif au sens, à l’intérêt des missions,
- Placer la reconnaissance au cœur des priorités,
- Recréer le sentiment d’appartenance,
- Proposer plus de flexibilité, d’autonomie et de liberté dans la manière de travailler,
- Créer un environnement de travail de qualité.
Enfin, la question du salaire reste centrale et cela est encore plus vrai dans un contexte inflationniste.
Ces critères sont le miroir des erreurs de management qui sont à l’origine d’un grand nombre de démissions[3]. Car de nombreuses études le prouvent, dans la moitié des cas au moins, on ne quitte pas son emploi mais son manager.
Pour pallier cette difficulté, certaines entreprises rivalisent d’inventivité pour attirer les candidatures et conserver les talents. Outre l’amélioration des salaires[4], la préservation de la vie personnelle et l’amélioration du quotidien sont aussi au cœur du sujet. Semaines de 4 jours payées 5[5], télétravail à volonté[6] ou vacances supplémentaires[7], les changements se multiplient dans certaines sociétés.
Au cœur de toutes ces initiatives managériales, la confiance qui témoigne de la fin d’une ère infantilisante et parfois autoritariste.
Bonne nouvelle, la tendance peut tout à fait être inversée.
Des salariés heureux et épanouis et donc… performants et productifs !
[1] Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques, direction du ministère du Travail, du Plein emploi et de l’Insertion qui produit des analyses, des études et des statistiques sur les thèmes du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.
[2] Indemnités de départ, couts de recrutement, temps d’adaptation des nouvelles recrues, baisse de la qualification et de l’expérience professionnelle du personnel…
[3] selon une étude américaine reprise par Cadremploi, le top 10 des pratiques managériales qui causent la démission : s’approprier le mérite du travail fait par l’équipe, ne pas faire confiance ou ne pas valoriser les membres de son équipe, ne pas se soucier d’une trop grande charge de travail, ne pas soutenir les demandes d’augmentation des membres de son équipe, embaucher ou promouvoir les mauvaises personnes, ne pas soutenir un collaborateur en cas de désaccord avec un client, ne pas donner d’objectifs ou de missions claires, surveiller sans cesse ses subordonnés, sans leur laisser d’autonomie, souligner davantage les faiblesses que les forces d’un collaborateur, ne pas exprimer clairement ses attentes
[4] Hausse de 3% en moyenne sur 2022, source Banque de France
[5] C’est le cas par exemple de Radioshop, IT Partner, Tenor
[6] Télétravail à la carte chez Accenture
[7] Congés illimités chez Indeed